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Les vertus du management par la confiance : portrait d'Hubert de Boisredon (H.86), PDG d'Armor.

HEC Life Project - Blog

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05/07/2021

Quand Hubert de Boisredon (H.86) prend les rênes du groupe industriel Armor, le chiffre d’affaires de l’entreprise est d’environ 120 millions d’euros, ses résultats sont proches de zéro. 16 ans plus tard, l’ETI nantaise, leader de la production de cartouches jet d’encre en Europe, affiche 274 millions de chiffre d’affaires, une belle rentabilité et emploie 2000 salariés. Quel est son secret ?

« Lorsque j’ai rejoint Armor en 2004, j’ai voulu que l’entreprise devienne un laboratoire du management par la confiance » explique Hubert. Une solide dose d’optimisme était alors nécessaire : les actionnaires voulaient vendre, les troupes étaient démobilisées, la direction sortante avait accentué les divisions. Qu’importe. Hubert se met à l’écoute de ses collaborateurs, s’appuie sur eux pour recréer une dynamique collective… et renverse la donne. « La force d’Armor a émergé des équipes : je n’ai fait que fédérer les ressources existantes. Je pense qu’en tant que dirigeant, il faut faire preuve d’humilité, ne surtout pas se positionner en « sachant » ni se croire détenteur de l’identité de l’entreprise : celle-ci appartient aux équipes. Le manager est comparable au fil d’un collier : il relie les perles mais reste invisible. »

L’innovation sociétale au cœur du business model

Deuxième pilier de la démarche d’Hubert : l’innovation sociétale, qu’il place au cœur du business model d’Armor. Pour prendre part à la transition énergétique, le groupe diversifie ainsi son activité de fabrication de consommables d’impression, développe des films photovoltaïques organiques pour les panneaux solaires et des films collecteurs de courant pour les batteries. Hubert s’est en effet forgé tôt, à travers deux expériences, la conviction que l’entreprise pouvait – et devait – avoir un but sociétal. En 1985, étudiant à NYU, il est frappé par le contraste entre la pauvreté à New York et les enseignements qu’il suit : « Je croisais des SDF en allant à l’université, mais nos cours de finance nous apprenaient que le but de l’entreprise était la maximisation des profits. » Ce décalage le conduit à créer avec Laurent Marbacher (H.86) une des premières banques de microcrédit d’Amérique Latine, Contigo, afin de « mettre l’argent au service du bien commun, pour avoir un impact sur la vie des gens ». Son second « choc » a lieu au tournant des années 2000, en Asie, lorsqu’Hubert, en poste chez Rhodia, découvre sur le terrain la pollution engendrée par les groupes chimiques chinois : « J’ai pu voir très concrètement les catastrophes que provoque la non-prise en compte de l’environnement par les entreprises. »

Lâcher prise et vulnérabilité

Pour mobiliser ses équipes, Hubert récuse les recettes managériales éculées : « Le management par la pression est contre-productif. Il n’incite pas les salariés à se surpasser. Au contraire : il les oblige à se protéger. Alors qu’un climat bienveillant permet à chacun de donner le meilleur de soi. » Il souligne aussi l’importance, pour un manager, d’accepter ses zones de vulnérabilité : « Il ne sert à rien de feindre la force. Si vous n’êtes pas authentique, les collaborateurs le ressentent vite. » Le lâcher prise génère un cercle vertueux, comme l’illustre un épisode fondateur chez Armor : « Lors d’un séminaire, mes associés ont commencé à pointer mes erreurs. Mon premier réflexe a été défensif, mais le coach présent m’a incité à les laisser parler. J’ai passé un moment pénible, avec l’impression de perdre toute ma légitimité de leader. Quand j’ai voulu répondre à la fin, un associé m’a arrêté en souriant : “Ce n’est pas nécessaire. Si nous vous avons dit tout ceci, c’est parce que nous vous faisons confiance“» Les liens tissés ce jour-là ont soudé l’équipe de direction : « Ils nous ont conduit à reprendre ensemble le contrôle du capital d’Armor, ce qui paraissait impossible jusque-là. Depuis, nous sommes restés unis autour du même objectif, même si nous avons tous des personnalités et parcours très différents. »

L’alignement, une vertu cardinale

Hubert n’hésite pas à dénoncer les postures hypocrites. Si une entreprise déclare œuvrer pour le bien commun, ses pratiques en interne doivent être en cohérence avec ses valeurs : « Je suis choqué par les grands groupes qui affichent de belles raisons d’être, mais dont les comportements prédateurs (OPA hostiles, licenciements abusifs etc.) dénotent un profond irrespect des équipes. Comment peut-on prétendre mobiliser ses collaborateurs quand on agit contre eux ? » Pour Hubert, la clef est d’aligner son idéal et ses actions, avec ses équipes, comme avec ses parties prenantes. Et d’être animé par des convictions fortes : « Le management par la confiance et l’innovation sociétale doivent reposer sur un engagement sincère, pas sur un calcul. Si la performance financière vient de surcroit, tant mieux - de nombreux dirigeants peuvent d’ailleurs témoigner qu’une vision sociétale ne dessert pas leur entreprise. Mais si la recherche de rentabilité est le moteur premier des décisions, le cercle vertueux ne s’enclenche pas. »

 Au vu du parcours d’Hubert, aucun doute possible : le futur du travail appartient aux leaders authentiques, qui puisent leur optimisme dans l’alignement entre leurs idéaux et leurs actes !

Rédaction : Marianne Gérard pour HEC Life Project
Crédit photo d'Hubert de Boisredon : ©Oioo.fr

REPLAY // Festival Life Project 2021 - Le futur du travail appartient aux optimistes. Table ronde "Purposeful Leadership : regards croisés" Avec Hubert de Boisredon (H.86), PDG d'Armor et Rodolphe Durand, Professeur à HEC Paris, titulaire de la chaire "Joly Family Chair in Purposeful Leadership", fondateur et directeur académique de l'Institut Society and Organizations. Animé par Cécile de Lisle, Directrice Executive de la Chaire "Purposeful Leadership" d'HEC.

 



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